La vie de David Gale, le comble de
l’engagement
On aura tout vu: David
Gale (Kevin Spacey), " génie académique ",
membre du groupe Death Watch militant contre la peine de mort dans son
état du Texas, est condamné à mort pour le meurtre et le
viol de sa meilleure amie, elle-même porte-parole de Death Watch.
La journaliste Bistey Bloom (Kate Winslet) ne dispose que de trois jours pour
obtenir ses aveux. Coupable ou innocent?
Aux dires mêmes
d’Alan Parker (celui qui en 1977 commit un (autre) film putassier, Midnight
express), La Vie de David Gale n’est pas un réquisitoire,
mais un simple thriller. Par ailleurs, le réalisateur déplore
la peine de mort; et si le message passe, tant mieux… Mais le but avoué
du film est de tenir le public en haleine et de l’émouvoir par le spectacle
du destin tragique d’un homme engagé.
L’exploitation à
des fins commerciales de sujets de société relatifs à des
valeurs morales pose un problème éthique que ni la désinvolture
ni la fausse modestie n’éludent. Dans un film, il y a toujours un discours,
formulé ou non. Le propre de la démagogie inhérente à
La Vie de David Gale, c’est d’utiliser la cause comme un pur moyen.
Le décompte des minutes qui rapprochent le héros de l’exécution
est le moteur du suspense. Mais la question est autant d’ordre esthétique
qu’éthique. Le serpent se mord la queue: car le fond n’est jamais dissociable
de la forme, et il est toujours bon que coïncident la parole interne du
film et son traitement.
La preuve, c’est que
La Vie de David Gale est un mauvais thriller racoleur et réductible à
un montage professionnel de clichés et de grosses ficelles, construit
sur des personnages stéréotypés, rythmé par des
rebondissements attendus, alourdi par une musique de circonstances, et un martelage
d’images à mots clé à titre de transitions. Comme c’est
trop souvent le cas, la dénonciation du politically correct l’est
elle-même on ne peut plus, et la prétendue indulgence envers les
excès du sexe et de l’alcool masquent à peine le puritanisme que
le film, loin de dénoncer, transmet. Au point qu’Alan Parker se réconcilie
avec la peine de mort, puisque la chute nous apprend que David Gale avait
souhaité et mis en scène sa propre mort, pour servir jusqu’au
bout la cause et par goût du sacrifice. Il l’avait bien cherché.